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Ouvriers venus de l’est
réponse à la Dépêche
dimanche 14 janvier 2007, par
Le reportage de la dépêche du midi (cf ci-dessus) sur les ouvriers du bâtiment venus de l’est laisse perplexe. Nous ne pouvons pas nous permettre de rester sans réactions face à ce sujet sensible, qui occupe bon nombre de conversations sur les chantiers.
On peut y lire que ce maçon travaille de temps à autre au noir. Le travail non déclaré est encouragé par les salaires trop bas. Mais qu’il n’est en aucun cas une solution. Il péjore notre système de solidarité de sécurité sociale et de retraite, géré en partie par les travailleurs. Si l’ouvrier y gagne sur le moment, il en est à terme la première victime. Il n’est pas couvert en cas d’accident, il participe à la destruction du système social puisque personne ne verse de cotisations.
Bien sûr, les patrons du btp ne peuvent pas délocaliser, mais ils peuvent importer une main d’oeuvre étrangère qu’ils emploient à moindre coût. C’est ce qu’il s’est toujours passé. Bien sûr, l’ouvrier de l’est, comme l’italien au début du siècle, l’espagnole après guerre, et celui du maghreb il y a quelques décénies, est toujours mieux payé en France que dans son pays d’origine, mais il l’est toujours moins qu’un ouvrier français. Lors de la percée du tunnel de la ligne B du métro toulousain, Eiffage avait embauché des coffreurs portugais, spécialement venus du Portugal. Ceux-ci, de niveau 2, percevaient un tout petit peu plus que 8 € de l’heure (soit à peine plus que le smic de l’époque), alors qu’un français du même niveau touchait 10 € de l’heure. C’était ça où le retour au Portugal.
L’entrée des pays de l’est dans l’Union Européenne est une aubaine pour les patrons ! Les dispositions d’embauche sont facilitées, les ouvriers se contente du salaire au rabais qu’on leur propose en France. De plus, ils sont dans une telle précarité dans leur pays d’origine qu’ils ne sont pas les premiers à lutter pour le progrès social en France. Alors qu’ils sont les premiers concernés.
Nous attendons que René Mouysset, président de la fédération Midi-Pyrénées du Bâtiment et des Travaux publics nous indique les entreprises qui embauchent à 1840€ brut, celles qui payent un OHQ à 2500 €. Comment se fait-il aussi que le vaillant polonais avec des années d’experience n’est payé que 1540 € ? René Mouysset tente d’opposer l’ouvrier polonais et l’ouvrier français. Ce n’est pas parce que le français tente de faire respecter des droits sociaux gagnés par les luttes qu’il n’est pas vaillant ! De tels propos ne font que faire monter le racisme déjà trop présent sur les chantiers. René Mouysset se réjouit aussi certainement de l’entrée de la roumanie et de la bulgarie dans l’UE. 300 000 roumains travaillent dans le btp avec un salaire moyen de 300 €. Ainsi dans le moniteur, Niculina Popescu, dirigeante du cabinet de recrutement parisien Dynamique-psycho, affirme que "les ouvriers roumains du BTP sont compétents, en particulier ceux de la filière bois et, étant de langue latine, ils comprennent le Français en deux mois environ. Leur adaptation sur un chantier hexagonal, ne me semble donc pas impossible. "
Le compétent roumain après le vaillant polonais. Tout cela colle parfaitement avec le discours gouvernemental d’y a quelques mois qui traitait les français de feignants.
Les situations des grands chantiers de l’Atlantique, où des polonais étaient entré en grève de la faim pour être payé vont se multiplier. La CNT-secteur bâtiment-, dans sa tradition internationaliste, ne tombera dans l’ornière du nationalisme. Seule la solidarité entre les ouviers pourra stopper le patronat dans ses tentatives de divisions et de destruction sociale.
Travailleurs français, Travailleurs immigrés, même patron, même combat !
CNT-Syndicat Unifié du Bâtiment
Ci joint l’article de LA DEPECHE DU MIDI.
PS : "REPORTAGE. DEPUIS HUIT MOIS, 600 000 OUVRIERS DU BÂTIMENT POLONAIS ONT QUITTÉ LEUR PAYS POUR OFFRIR LEURS SERVICES SUR LES CHANTIERS EUROPÉENS. DANS LE GRAND SUD, AVEC LES PORTUGAIS, ILS COMBLENT LA PÉNURIE DE MAIN D’OEUVRE.
Le bâtiment prend l’accent POLONAIS
« Chez nous, les entreprises sont obligées de recruter des maçons ukrainiens »...Voilà la réponse de l’ambassade de Pologne à Paris quand on l’interroge sur le nombre de ses ressortissants arrivés en France depuis le 1er mai 2006 pour travailler dans le bâtiment et les travaux publics.
Dans 17 spécialités, ils sont maintenant considérés comme des salariés français. A une redevance près (lire ci-dessous), ils sont embauchés et payés dans les mêmes conditions qu’un salarié français.
Le nombre de ces migrants est estimé à 600 000 entre la France, le Benelux et le Royaume-Uni (l’accord existait déjà avec l’Allemagne). En France, les premiers sont arrivés en Alsace. En caravane. Puis la filière s’est structurée. Des bureaux de recrutement ont ensuite embauché pour des grands chantiers (TGV est, métros de Toulouse et Rennes, tunnel du Perthus) et ils ont organisé les voyages.
Aujourd’hui, on retrouve ces travailleurs de l’Est présentés comme « vaillants et compétents » sur les grands comme sur les petits chantiers, à Toulouse et jusque dans des petites villes de Lot-et-Garonne. Ils travaillent et vivent discrètement. Ces plâtriers POLONAIS (peu de plombiers en fait), ces carreleurs portugais occupent les places vacantes dans les entreprises de BTP. Comme dans les années 1930 et après-guerre, lorsque leurs ancêtres venaient à la mine à Lens ou à Carmaux. L’Europe est une éternelle... construction. *P.J.*
*S*ur le balcon, deux pots de fleurs. Dans le salon, un poster des Pyrénées enneigées punaisé au mur, une télé sur une tablette avec son décodeur face au canapé et un ballon de foot dans un recoin... Le carrelage de ce 3 pièces-cuisine vieillot finit de sécher, les poubelles sont vidées, le frigo est rempli. Surtout de packs de bière. Tous les soirs, les deux maçons et le charpentier POLONAIS rentrent la Ford immatriculée au pays dans le garage en face : « On la soigne. Il faudra qu’elle nous ramène chez nous à Noël et qu’on revienne au mois de janvier. 2 500 kilomètres, c’est beaucoup. Pourvu qu’il n’y ait pas de neige sur les routes ».
C’est le chef de chantier qui a trouvé ce logement à ces trois ouvriers dans un petit collectif à Fenouillet, près de Toulouse. L’entreprise paye le loyer.
« Le chef est espagnol. Il parle mieux français que moi, mais tout juste. Mais lui habite en France depuis 36 ans. Vous n’aimez pas le métier de maçon, vous les Français ? rigole Lucjan Kalbzyck, 43 ans, le grand sec à la moustache, surnommé « l’interprète ».
Sur les chantiers, il traduit les consignes à ses collègues. Ce maçon originaire de Bialystok, à l’est de la Pologne, a commencé en juin son deuxième contrat de travail à Toulouse, le troisième en France. « Je suis venu il y a deux ans pour construire les hangars d’Airbus » dit-il fièrement :
« Nous logions au camping Rupé de Toulouse dans des bungalows. C’était super. On nous portait des plateaux-repas tous les soirs. Il y avait le bar, un patron de camping sympa. On partait ensemble au chantier à vélo. Des familles avaient passé une partie de l’été ici ».
Cette fois, deux jeunes collègues de 24 et 27 ans, un maçon et un charpentier béton, l’accompagnent. Ils ont débuté avec lui en Pologne voilà cinq ans.
« À Toulouse, on travaille sur deux chantiers d’immeubles à deux endroits dans la ville. Il y a des noirs, des Turcs, des Portugais, des Algériens dans l’entreprise, mais ils sont en famille et on ne se comprend pas trop. On a des copains du pays qui construisent un casino et d’autres à 50 kilomètres d’ici. Ici, on voit des chantiers partout. En Pologne aussi, mais le métier de maçon, ça ne paye pas ».
Leur contrat à durée déterminée avec une entreprise filiale de Bouygues leur assure 1 520 EUR par mois brut. Plus des primes, des heures sup, le repas de midi et... l’abonnement à Canal +. « On regarde tous les matches de foot et des films où on n’a pas besoin de parler français pour comprendre ».
Eclats de rire. L’été dernier, ses deux jeunes acolytes, deux solides gaillards un peu timides, ont aussi « fait quelques extras sur des petits chantiers avec des Turcs le dimanche ».
Mais ces travailleurs communautaires respectent leur contrat ou presque : pour les horaires, ils « s’arrangent tacitement avec l’employeur, aux marges de la légalité : 10 heures par jour, parfois du boulot le samedi matin, mais ils auront droit à deux semaines à Noë et termineront deux semaines avant la fin du CDD : « C’est mieux comme ça ».
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« La RTT, cela s’aménage » commente sobrement leur employeur qui veut rester discret. En Pologne, après 21 ans de bâtiment, Lucjan gagnait 388 EUR par mois avec des semaines de travail à 42 heures.
« Mais je suis sûr de retrouver du boulot en rentrant. Les bons maçons POLONAIS sont en Allemagne, en Belgique et en France. Maintenant, on n’a plus besoin de faire des tas de papiers, on peut mettre l’argent sur notre compte en Pologne depuis une banque de Toulouse ».
Ses deux premiers contrats, il les avait signés en Pologne dans un bureau de recrutement. Cette fois, il a été appelé directement par un « chef » de son précédent employeur.
Il n’a pas eu à verser de frais d’inscription, il a pu prendre sa voiture, « chargée de cigarettes parce qu’ici c’est trop cher ».
Les dépenses à Toulouse se limitent à la nourriture, au carburant, à un ou deux matches au stadium, quelques cadeaux pour les neveux et les parents avant de repartir...
« Nous préférons venir comme ça pour quelques mois et repartir chez nous. Avec l’argent qu’on ramène, on vit bien. J’aide même mes parents » raconte Lucjan.
Il entend profiter des facilités de l’Europe pendant quatre ou cinq ans avant de se fixer dans une entreprise en Pologne : « Peut-être que d’ici là, les salaires dans mon pays auront augmenté ».
Reportage Pascal Jalabert
Pourquoi les Polonais affluent
Les accords
de l’élargissement
Depuis le 1er mai
2006, 61 métiers ont été ouverts aux travailleurs POLONAIS dans les mêmes conditions que pour tous les ressortissants français et communautaires. L’employeur doit juste s’acquitter d’une redevance forfaitaire (168EUR pour un CDD, 893 pour un CDI) à l’office national des migrations, l’équivalent de l’Unedic. Parmi ces métiers, 16 concernent le BTP. Ainsi, au moins de 600 000 Polonais entre 22 et 50 ans ont émigré dans d’autres pays de l’UE que l’Allemagne. 72 % seraient salariés dans le bâtiment.
Les départs
à la retraite massifs
Depuis deux ans, 60 0000 des 80 000 salariés du bâtiment qui quittent leur entreprise partent à la retraite. Autre phénomène démographique spécifique à ce secteur : les travailleurs portugais et algériens arrivés en France dans les années 1960 à 1973 cessent aussi leur activité.
Des métiers désertés par les Français
Depuis 10 ans, les métiers du bâtiment, réputés durs et peu rémunérateurs, souffrent en France d’une vraie désaffection.
Des carnets de
commandes bien
remplis La production de logements est en forte hausse. Dans le Grand sud, où la population augmente, s’y ajoutent des commandes abondantes de chantiers publics (hôpitaux, universités, routes...).
INTERVIEW. RENÉ MOUYSSET, PRÉSIDENT DU BTP MIDI-PYRÉNÉES.
« Ils sont vaillants et compétents »
René Mouysset, président de la fédération Midi-Pyrénées du Bâtiment et des Travaux publics.
Ce recrutement est-il un palliatif ?
Le recrutement communautaire apporte une solution légale, rapide et efficace à notre déficit de main-d’oeuvre. On recrute aussi bien des ouvriers pour des tâches basiques que du personnel spécialisé dans des missions précises (Polonais pour les bâtiments agricoles, Portugais pour des soudures sur le viaduc de Millau par exemple). Ce que l’on nous dit, c’est que les Polonais sont vaillants et compétents. Ceux qui viennent ont déjà une formation, une expérience.
En général, l’entrepreneur aide à leur trouver un logement correct, à les intégrer dans les équipes, ce qui est plus facile dans l’Aveyron qu’à Toulouse, par exemple.
La tendance est-elle durable ?
Pas forcément. L’effort de promotion auprès des jeunes et dans les collèges finit par porter ses fruits : nos centres de formation d’apprentis sont pleins, l’Éducation nationale joue le jeu et des demandeurs d’emploi commencent à arriver sur les stages de reconversion. L’objectif, c’est de parvenir à recruter à parts égales des demandeurs d’emploi, des apprentis et des jeunes sortis du système scolaire.
Le manque d’attractivité viendrait aussi de rémunérations insuffisantes ?
Faux procès. En 4 ans, le salaire moyen dans nos entreprises a été augmenté de 30 %. Avec un niveau CAP, après deux ans d’apprentissage, un bon ouvrier peut débuter à 1 840 EUR brut avec des chances de progression. Dans des secteurs plus qualifiés, on embauche même parfois un ouvrier à 2 300 EUR brut. Aucune autre catégorie de métiers ne possède des taux aussi élevés de passage de CDD en CDI. Nos métiers ne sont pas délocalisables.
Les Portugais aussi
Comme dans les années 1960, les entreprises du BTP recrutent aussi au Portugal. Mais le phénomène est différent de celui des Polonais et concerne davantage l’artisanat. Ces jeunes ouvriers portugais sont, en fait, embauchés par des chefs d’entreprise d’origine portugaise installés de longue date mais qui n’ont pas rompu le lien avec leur pays.