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Vous écrivez des lois, On écrit l’histoire !

jeudi 6 juillet 2006

C’est du jamais vu ! Depuis 2001 et le
mouvement contre la reforme LMD c’est le plus
grand soulèvement des étudiant(e)s. Au 25 juin,
241 facultés (A.E.I.) sur 258 et 186 écoles
techniques (T.E.I.) sur 198 sont occupées par les
étudiant(e)s !

La plupart des étudiant(e)s ont déjà raté leurs
session d’examens mais personne n’a envie de
baisser les bras tant que le gouvernement
(droite) ne retire pas son projet de loi qui
concerne l’éducation supérieure. Il y a déjà 6-7
semaines que le mouvement estudiantin grecque
est entré dans un bras de fer avec le ministère
d’éducation et de religions.

Quels sont les points les plus importants de ce
projet de loi :

 Il fixe un nombre maximal d’années
d’étude à x+x/2 années, x étant le nombre
« normal » d’années d’études pour le
diplôme concerné. Par exemple, une
étudiante n’ayant pas terminé sa maîtrise
en 6 ans (4 années normale + 4/2=2
années de plus = 6 années), elle sera
simplement rejetée par la faculté... alors
pas de possibilité de redoubler plusieurs
fois et encore plus difficile d’obtenir le
diplôme, surtout pour ceux et celles qui
sont obligé(e)s de travailler pendant leurs
études... Le victime devient alors
coupable et le gouvernement fait
apparaître les étudiant(e)s « éternel(le)s »
comme le problème le plus grave de
l’éducation supérieure tandis que sont
négligés les véritables problèmes
(manque de financement, manque
d’infrastructures- seulement 3,5% du
financement public de l’état grec est
attribué à l’éducation).
 Il facilite la suppression de « l’asile
universitaire ». Depuis la chute de la
dictature en 1974, la police n’a pas le
droit d’envahir les universités (sauf en
cas de crime « grave »). En combinaison
avec les propositions du ministère pour la
présence des vigiles dans les facultés, on
peut imaginer que des types de
protestation comme l’occupation ou
même l’organisation de manifestations
politiques (ex. forum libertaire) ou
culturelles « dérangeantes » dans des
universités sera pratiquement impossible.
L’évacuation de la Sorbonne et d’autres
facultés par les CRS ne semble pas très
loin...
 Il abolit le droit à un ouvrage gratuit, le
droit de base de l’éducation gratuite.
L’actuel système de la distribution
gratuite d’un ouvrage au moins par cours
est jugé comme « gaspilleur,
anachronique et restrictif de la procédure
d’apprentissage »...
 Il institutionnalise l’embauche des « 
managers » pour les universités pour
réussir le contrôle économique et
administratif des universités. Avec
l’embauche des « managers » le ministère
recherche la plus grande jonction entre
les universités et les lois libre marché.
Désormais les structures du marché
contrôleront l’université avec pour but la
formation des diplômé(e)s « idéaux(ales)
 » prêt(e)s pour les arènes du libre
marché.

Avec tous les changements ci-dessus et en
combinaison avec la révision de l’article 16 de la
constitution, facilitant la création d’universités
privées (l’état grecque ne reconnaît pas
actuellement les diplômes venant des
institutions privées) une université d’une
nouvelle forme est institutionnalisée :
 Une université qui fonctionnera avec les
priorités du profit, qui avec la présence
des « managers » et des frais de scolarité
« mendiera » aux entreprises privées, soit
pour louer ses espaces, soit avec pour
leur vendre « de la connaissance ». Une
université qui produira des « bon(ne)s »
travailleur(se)s, c’est à dire, une
université qui leur aura appris ce que
signifie baisser la tête et courir du matin
au soir.
 Une université qui ne connaîtra rien de
politique, de combats collectifs, d’esprit
critique.
 De plus, une université qui aura oublié sa
relation constante avec les intérêts
collectifs, avec des luttes avec l’esprit de
solidarité.

Contre ce projet de loi, contre cet esprit qui
transforme l’université en entreprise et les
étudiant(e)s en travailleur(se)s (bon marche en
plus), le mouvement estudiantin réagit et
s’organise : des AG gigantesques, des manifs
pacifiques ou violentes qui regroupent des
dizaines de milliers de personnes, des tracts, des
affiches,... et le plus important peut-être, les
endroits occupés restent vivants, avec des
discussions, des manifestations culturelles ou
politiques (par exemple, le 9ième festival antiraciste
de Salonique a commencé le 22 juin dans
la faculté)... Le slogan "ça se passera comme en
France" c’est l’engagement pour un combat
intransigeant du mouvement étudiant jusqu’à la
victoire !

Après presque 2 mois de luttes pour quelques
universités, les revendications du mouvement
sont allées beaucoup plus loin. Il suffit
seulement de lire les décisions et les
propositions aux AG et à la coordination des AG
des facs occupées pour comprendre que
l’abrogation de ce projet de loi n’est pas
suffisante pour que le mouvement s’éteigne.
Bien sur, dans le mouvement, il y a plusieurs
tendances politiques et les tensions parmi les
différents groupes politiques ne manquent pas.
Le soulèvement a commencé à l’initiative des
quelques groupes d’extrême-gauche et après
deux mois il est supporté par presque tous les
groupes politiques (il y a beaucoup de méfiance
contre le PC et le PS grec) de la gauche du PS
jusqu’aux anarchistes et aux autonomes
radicaux.

Et comme en France, il y a quelques mois, ainsi
qu’en Grèce les étudiant(e)s essayent de se
réunir, de se retrouver avec les
travailleur(euse)s et réciproquement. La preuve,
pour la dernière manifestation de 22 juin
nombreuses étaient les appels et les préavis de
grève des différentes fédérations. Encore plus
nombreuses sont les motions de solidarité et de
soutien qui viennent des associations des
travailleur(euse)s, même de l’étranger. Voici la
traduction d’un extrait de la décision de l’AG de
l’université de Panteios : « ...pour l’avancée de
cette lutte pour notre éducation, notre travail,
nos vies nous appelons tous les secteurs en lutte
de l’éducation (élèves, enseignant(e)s et
globalement tous les travailleurs à appeler à la
grève générale. ».

Bien sur, les syndicalistes officiel(le)s et les
bureaucrates de tous poils (pères des
étudiant(e)s ou pères des travailleur(se)s comme
ils les appellent en Grèce) font tout pour
contrôler le mouvement. Et si on ne peut pas le
contrôler la solution est connue, bien simple est
trop facile : on le laisse tomber...

A côté de tout ça L’État et ses rouages ne
restent pas inactifs... Depuis le début du
mouvement le Ministère parlait de
désinformation des étudiants et de leur
manipulation par des groupements extrémistes.
Toutefois, vu l’ampleur du mouvement, Gianakou
(la Ministre de l’enseignement) a changé de ton.
Premièrement elle a dit que la proposition de loi
ne sera pas discutée lors de la séance d’été du
Parlement comme prévu mais à la séance
plénière de la rentré, une fois les élections
communales passées. Deuxièmement elle essaie
de séduire le mouvement, en proposant le
dialogue et la négociation sur le contenu de la loi
cadre. Dialogue d’un côté, répression de l’autre.
A chaque manifestation (surtout à Athènes et à
Salonique) les CRS et la BAC (leurs équivalents
grecques) utilisent des matraques et des
lacrymogènes et dizaines de personnes sont mis
en garde à vue. La répression de la
manifestation nationale à Athènes le 8/06 était
telle que (miracle !) les médias grecs ont décidé
de commencer à parler du mouvement (comme
par hasard l’accent a été mise sur les vitrines de
banques cassées et les poubelles brûlées).
Il est évident que le Gouvernement sent la
pression et sent qu’il a mal géré l’affaire (trop de
reformes à caractère anti-populaire,
manipulation médiatique, répression violente du
mouvement etc.). Surtout à quelques mois des
élections il veut apaiser la situation, mais il est
probablement trop tard...

Actuellement les étudiant(e)s rencontrent
beaucoup des difficultés (massification,
participation aux occupations, vacances etc.).
Malgré celles-ci, le mouvement tient encore le
coup. Il grandit, acquiert ses expériences,
développe sa conscience...

Et comme soulignent les insurgé(e)s :

AUX PROBLÈMES COLLECTIFS
IL N’Y A PAS DE SOLUTIONS INDIVIDUELLES !
DES COMBATS SANS VICTOIRES EXISTENT
DES VICTOIRES SANS COMBATS NON !